C'est le Syndicat des producteurs de Pouligny-saint-Pierre, créé en 1969, qui a fait la demande et obtenu l'AOC en 1972. A l'époque c'est le Service de répression des fraudes qui recevait la demande, l'INAO n'ayant alors que la charge des vins et alcools. L'origine de la démarche vient en réalité d'un autre syndicat : le Syndicat caprin, créé au lendemain de la guerre pour aider à l'amélioration des qualités laitières des chèvres. À l'époque, presque toutes les fermes possédaient quelques chèvres. Élevées par les femmes, elles permettaient, sans autres soins que leur surveillance confiée en général aux grands-mères , la confection de fromages pour la famille et la vente sur les marchés locaux. Ces chèvres décrites comme ressemblant à des chiens de chasse, hautes sur pattes, plutôt sombres et à poils longs étaient sans doute de la race poitevine, quelquefois appelée race Berry-Touraine-Limousin.
Au Blanc, un propriétaire de chèvres faisait venir de Savoie, l'une des rares régions où les élevages caprins étaient contrôlés et où la sélection des meilleures laitières étaient déjà bien établie, un bouc tous les deux ou trois ans pour améliorer son petit troupeau. Mais, si les chèvres pouvaient résider en ville, il n'en était pas de même pour le bouc dont l'odeur posait problème au voisinage. Celui-ci était donc installé à Mont-la-Chapelle, l'un des villages de Pouligny-Saint-Pierre à quelques kilomètres du Blanc. Les propriétaires de chèvres aux alentours en profitaient aussi pour faire saillir leurs chèvres sans avoir besoin de posséder un bouc.
A cet exemple. André Rémondeau. un agriculteur de Pouligny-Saint-Pierre, eut l'idée de créer un syndicat qui permettrait à ses adhérents de faire venir des boucs d'élevages contrôlés (élevages où la production de lait était mesurée et donc connue pour chaque chèvre) et de les " faire tourner " dans les fermes à tour de rôle. Il rassembla dans cet organisme un certain nombre de producteurs qui, après avoir travaillé ensemble à l'amélioration caprine, se sont intéressés aux fromages et, conseillés par le technicien caprin de la Chambre d'agriculture, tout naturellement à l'AOC.
Le Pouligny-Saint-Pierre ne semble pas avoir eu de grosses difficultés à obtenir l'AOC. Les seuls souvenirs évoqués par ceux qui suivirent cette affaire sont les voyages à Paris, en compagnie "d'autres-fromages en AOC ou en cours de demande". Ainsi le premier voyage fut fait "les mains dans les poches", c'est à dire sans fromages. C'est "à La cantine du Ministère"
qu'ils s'aperçurent que les autres avaient apporté des fromages dégustés en fin de repas.
Il va sans dire qu'au voyage suivant, ils rassemblèrent des Pouligny... Mais ils n'étaient pas nombreux, et pas riches... Aussi, la vue de leurs fromages disposés de loin en loin sur tables les inquiéta... Inquiétude sans lendemain puisque tous les convives les apprécièrent.
Ajoutons que pour la petite histoire, ils comprirent très vite que, les cuisiniers du Ministère étant de fins gourmets, un premier prélèvement s'effectuait avant la mise en place sur les tables...
Ainsi par décret du 14 janvier 1972 le Pouligny-Saint-Pierre devint le premier fromage de chèvre à bénéficier de l'AOC.
Quinze autres fromages étaient alors en AOC, aujourd'hui ils sont quarante-cinq, dont quatorze fromages de chèvre et trois de brebis. Six demandes sont en cours comprenant 3 frommages de chèvre.